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30 octobre 2017 | י חשון התשעח
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Un cœur pour la paix : lorsqu’Israël sauve des enfants palestiniens

Le professeur Jean-Jacques Azaria Rein au chevet d'un de ses petits patients palestiniens - Crédit photo : Un coeur pour la paix

Le professeur Jean-Jacques Azaria Rein au chevet d’un de ses petits patients palestiniens - Crédit photo : www.uncoeurpourlapaix.org

Unis autour d’une même mission, médecins israéliens et palestiniens opèrent ensemble des enfants palestiniens atteints de malformations cardiaques congénitales. L’ONG française « Un cœur pour la paix » qui a créé ce programme fête ses dix ans d’activité, au cours desquels, en partenariat avec l’hôpital israélien Hadassah Ein Kerem, 619 petits Palestiniens ont été opérés gratuitement du cœur.

Une initiative humanitaire pour sauver des enfants palestiniens

Au septième étage du bâtiment de la mère et de l’enfant d’Hadassah Ein Kerem, sous le regard bienveillant des dauphins fluorescents qui accueillent les enfants malades, se trouve le service de soins intensifs du département de cardiologie pédiatrique du grand centre hospitalier de Jérusalem. C’est là que l’équipe du professeur Jean-Jacques Azaria Rein opère des enfants palestiniens atteints de malformations cardiaques et qui n’auraient aucune chance de survie dans un centre médical de l’Autorité palestinienne, non équipé pour ces interventions complexes.

dauphins

Le service de cardiologie pédiatrique d’Hadassah - Crédit photo : Yaël Ancri

Pour remédier à l’absence de couverture sociale satisfaisante dans les territoires sous contrôle palestinien, l’hôpital Hadassah et l’ONG « Un cœur pour la paix » financent ces opérations coûteuses (14 000 euros). « Avant les Accords d’Oslo, la santé en Cisjordanie était sous la responsabilité d’Israël. Elle est ensuite passée sous celle de l’Autorité palestinienne. Comme beaucoup de pays en voie de développement, la Cisjordanie a choisi de privilégier les soins primaires (de base). Les soins tertiaires comme on les pratique ici ne sont pas souvent pris en charge parce qu’ils sont trop chers », explique à Israpresse la docteure Muriel Haïm, présidente d’« Un cœur pour la paix ».

« J’ai rencontré le professeur Rein il y a dix ans et je lui ai demandé ce que nous pouvions faire pour l’aider », se souvient la gériatre qui partage sa vie entre Jérusalem et Paris. Les besoins sont en effet importants, car chez les Palestiniens, la consanguinité concerne environ un mariage sur deux, entraînant un taux de malformations cardiaques congénitales trois fois supérieur à celui de la population générale. Pour aider le professeur Rein et son équipe à opérer un enfant de plus par semaine, le Dr Haïm fonde un « Cœur pour la paix » en septembre 2005.

Plus de 600 enfants sauvés et 200 médecins formés

Dr Ibrahim Abou Zahira - Crédit photo : Yaël Ancri/Israpresse

Dr Ibrahim Abou Zahira - Crédit photo : Yaël Ancri/Israpresse

En dix ans d’existence, l’organisation a permis à 619 enfants palestiniens d’être opérés gratuitement en Israël par une équipe de médecins israéliens et palestiniens. Pour dépister les grossesses à risques et les enfants souffrant de malformations, l’association a aussi formé 197 médecins généralistes.

Du reste, des médecins palestiniens continuent à se spécialiser quotidiennement à Hadassah et un « Cœur pour la paix » en a formé cinq à l’échocardiographie ou au cathétérisme. Avec l’aide de l’association, ils ont ouvert un centre de cardiologie pédiatrique à Ramallah en 2012 et un autre à Hébron le 1er mars 2015.

Le cardiopédiatre Ibrahim Abou Zahira travaille dans ce cabinet de cardiologie de pointe à Hébron, ainsi qu’à Hadassah depuis plus d’un an et demi. Spécialiste notamment des opérations à cœur fermé, il se « dit membre ‘un peu actif’ de l’association ».

Jinan, âgée d'un mois - Crédit photo : Yaël Ancri/Israpresse

Jinan, âgée d’un mois - Crédit photo : Yaël Ancri/Israpresse

En fait, beaucoup d’enfants palestiniens doivent leur vie au Dr Abou Zahira, comme la petite Jinan de Beth Lehem, qu’il a aiguillée à Hadassah alors qu’elle n’avait qu’une semaine. Opérée par le chirurgien israélien Eldad Erez, le bébé est maintenant sorti des soins intensifs et récupère en service de cardiologie pédiatrique, avec sa maman qui ne tarit pas d’éloges sur l’équipe qui a traité son enfant comme n’importe quel autre patient. « Je n’ai pas eu peur de venir faire soigner mon enfant ici, car sa santé était prioritaire à mes yeux. Ici, nous bénéficions de soins excellents et rien ne nous manque », raconte la jeune femme à Israpresse.

« Faire une différence entre les patients, c’est s’engager sur une piste glissante »

L’histoire d’« Un cœur pour la paix » est celle d’une coopération étroite entre médecins israéliens et palestiniens, mais aussi avec les autorités israéliennes qui autorisent toujours le transfert des enfants malades qu’ils arrivent de Ramallah ou de Gaza. « Environ 20 % des enfants viennent de Gaza et sur 619 enfants opérés, on n’a jamais eu un enfant arrêté à un poste de contrôle. Si c’est une urgence, un enfant arrive en deux heures », se réjouit le Dr Haïm.

À Hadassah, « l’ennemi, c’est la maladie ». « Quand on m’appelle à deux heures du matin, je ne sais pas l’origine de l’enfant et cela n’a pas d’importance. Tout le monde reçoit le même traitement et il ne pourrait en être autrement. Il y a beaucoup de médecins arabes qui soignent des patients juifs et de médecins juifs qui soignent des Arabes. Nous sommes une seule et même équipe et nous faisons les mêmes efforts pour tous les malades, en laissant les conflits et la politique de côté  », déclare le Dr Amiram Nir, directeur du service des maladies cardiaques congénitales des adultes.

« Je pense que si nous contribuons un peu à la compréhension entre les peuples, nous faisons quelque chose d’important », conclut le professeur Nir.

Yaël Ancri