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30 octobre 2017 | י חשון התשעח
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Dror Mishani, le nouveau maître du polar israélien

La violence en embuscade, Seuil, 2015Après le détective Michael Ohayon, héros des romans policiers de Batya Gour, pionnière du genre en Israël, un nouveau personnage a fait son apparition sur la scène du polar israélien, le détective Avraham Avraham. Auteur d’un premier polar, « Une disparition inquiétante » sorti en Israël en 2011 et récemment traduit en français, Dror Mishani, universitaire israélien enseignant la littérature policière à l’université de Tel Aviv, signe un nouvel opus de la série mettant en scène Avraham Avraham. Dans « La violence en embuscade » (Seuil, 2015), le détective Avraham Avraham enquête sur la présence d’une valise contenant une fausse bombe aux abords d’une crèche de Holon, près de Tel Aviv.

Fils d’un ancien député et avocat, Dror Mishani, 40 ans, a traduit en hébreu Michel Foucault et Roland Barthes avant de publier son premier livre en 2006. Dans un entretien avec IsraPresse, il parle de son héros mais aussi du roman policier en Israël.

IsraPresse: Êtes-vous un enseignant qui écrit des livres ou un écrivain qui enseigne?

Dror Mishani: Il y a quelques années, à savoir avant d’écrire le premier roman de la série du détective Avraham Avraham (Keter, 2011), j’étais chercheur en littérature et je rêvais d’écrire. Mais depuis que je me suis assis pour écrire mon premier livre, je suis presque exclusivement écrivain. J’enseigne toujours à l’université, mais fais rarement de la recherche, la quasi-totalité de ma vie est consacrée à l’écriture. En fait, c’est ce que j’ai toujours voulu. Le plan a toujours été d’écrire de la fiction. Ecrire sur la littérature était, pour moi, une étape importante.

IP : Comment enseigner la littérature policière à l’université ?

D.M. : De nos jours, c’est très facile. La littérature policière a une histoire très glorieuse qui comprend des écrivains, voire même de grands écrivains - Edgar Allan Poe, Arthur Conan Doyle, Agatha Christie, Simenon, Chandler, Hammett, P.D. James, et beaucoup d’autres. Tous ces auteurs sont de grands écrivains et innovateurs car ils se situent en dehors des frontières du genre.

Dans le même temps, la pensée théorique de la littérature de détectives a continué de se développer et il existe de nombreux textes d’interprétation et de différents types sur ce thème: Freud a écrit sur le sujet, mais aussi Walter Benjamin, Jacques Lacan et Roland Barthes.

Donc, le problème de la construction d’un bon cours universitaire de littérature policière aujourd’hui est que le corpus littéraire et théorique est trop large…

Dror Mishani - Quais du polar, Lyon mars 2015 - Credit: Sophie Bassoul

Dror Mishani - Quais du polar, Lyon mars 2015 - Credit photo: Sophie Bassoul

IP : Ne craignez-vous que votre personnage soit trop populaire et que l’on ne lui donne aucune une chance parce qu’il s’appelle « Avraham Avraham »? Maintenant que vous êtes traduit dans plusieurs langues, auriez-vous changé son nom?

D.M. : Non. Et je n’aurais vraiment pas changé son nom. Je pense que le nom d’Avraham Avraham a une double signification. D’une part, comme vous dites, il peut représenter une image réelle d’un policier israélien venu de la classe moyenne inférieure (et il était très important pour moi d’écrire un roman réaliste). D’autre part, Avraham est un nom d’une richesse contextuelle importante dans la culture hébraïque. D’ailleurs, c’est son nom, il est né comme cela et je ne peux pas changer, sauf s’il choisit de faire lui-même dans un livre.

IP : Comme la littérature policière en Israël est limitée, aviez-vous un personnage qui vous a particulièrement inspiré?

D.M. : Mes sources d’inspiration ne proviennent pas de la littérature hébraïque en effet. Elles découlent principalement de la littérature européenne, le commissaire Maigret de Georges Simenon, Martin Beck de Maj Sjöwall et Per Wahlöö, et Kurt Wallander de Henning Mankell. D’autre part, en tant que lecteur de la littérature hébraïque et chercheur, il y a d’innombrables écrivains qui n’écrivent pas de romans policiers, mais dont l’écriture est une source d’inspiration, de Yossef Haim Brenner à Ronit Matalon.

IP : Est-ce qu’Avraham Avraham sera-t-il avec nous encore plusieurs années ou pensez-vous à un autre personnage?

D.M.: Le troisième livre, « L’homme qui voulait tout savoir » (Abayit, 2015), a été publié en effet tout récemment. C’est donc le troisième livre de la série du détective Avraham Avraham (et probablement le plus audacieux de la série à ce jour). Je ne vais certainement pas me séparer d’Avraham maintenant. Je pense que des enquêtes passionnantes l’attendent encore…

Propos recueillis par Nelly Ben Israël

 

Dror Mishani. La violence en embuscade. Seuil, 2015.

Dror Mishani. Une disparition inquiétante. Seuil, 2014.

Les deux ouvrages sont traduits de l’hébreu par Laurence Sendrowicz.